marche verte 2025

DRISS LYAKOUBI

A Kénitra, le piéton est le dernier des soucis de certains promoteurs immobiliers. Il est considéré comme le maillon faible de la mobilité urbaine. Tout en saluant la campagne menée par les autorités locales pour libérer l’espace publique, il est à souligner qu’au niveau de plusieurs quartiers marcher à pied relève de l’exploit et constitue un véritable parcours de combattant. Entre véhicules de toutes sortes, terrasses de cafés, restaurants, magasins, espaces occupés et différents travaux de construction ou d’assainissement, les trottoirs perdent peu à peu leur fonction d’origine.

Les obstacles auxquels se heurtent quotidiennement le piéton sont multiples. Les personnes en situation de handicap sont les premières victimes de cette situation surréaliste. Elles rencontrent de gros problèmes de déplacement et éprouvent des difficultés pour parcourir de petites distances. A titre d’exemple, certains propriétaires de villas, comme c’est le cas au quartier Bir Rami, occupent l’espace public d’une manière illégale. Ils transforment le trottoir en face de leurs propriétés en jardins et ne laissent quasiment pas d’espaces aux valeureux piétons.

Le comble de l’insouciance est qu’ils protègent ces « jardins interdits » par des clôtures qui varient entre fil barbelé, chaînes en fer ou grilles en fer forgé. Le vaillant passant désarçonné n’a d’autres alternatives que de marcher sur la chaussée à proximité des véhicules circulant à vive allure. Statistiques à l’appui, la majorité des des victimes sont hélas des piétons

Les terrasses de cafés et de restaurants constituent aussi une autre source d’inquiétude pour les usagers du trottoir. Au-delà des limites permises, plusieurs propriétaires de ces commerces investissent la quasi-totalité des espaces réservés aux piétons, qui n’ont le choix que de slalomer entre les chaises, les tables, les étalages ou de descendre carrément sur la chaussée à leurs risques et périls. Certains cafetiers et propriétaires de snacks poussent le bouchon encore plus loin en installant des barrières qui occupent quasiment l’ensemble du trottoir. Il faut reconnaitre que des efforts sont entrepris par les autorités locales et les services de la Sûreté nationale pour endiguer ce phénomène, malheureusement comme dit l’adage « Chasse le naturel, il revient au galop ».

L’urbanisation outrancière a, par ailleurs, accentué la pression sur l’espace public réservé aux piétons. En effet, la ville de Kénitra manque cruellement de parkings et certains automobilistes garent leurs véhicules sur les trottoirs sans se soucier, le moins du monde, des passants désemparés. D’ailleurs, Il n’est pas rare de trouver des voitures stationnant en biais constituant un véritable obstacle pour les piétons. Outre le stationnement anarchique des voitures, plusieurs trottoirs sont dans un état de délabrement avancé. Les crevasses, les fissures et les trous béants, le manque d’accessibilités, sans oublier le phénomène de dénivelés ne se comptent plus.

Le passant trouve énormément de difficultés pour éviter les mauvaises surprises devant tant de pièges. Parfois il doit être extrêmement vigilant pour savoir où il met les pieds. Il est constamment sous pression et il n’est pas à l’abri d’une déconvenue. Plusieurs piétons se sont d’ailleurs plaints d’avoir été victimes de chutes, parfois graves, à cause des trottoirs défoncés ou à niveaux variables. Les personnes âgées, les handicapés et les parents accompagnés d’enfants en bas âge sont les premiers à souffrir de cette situation devenue de plus en plus intolérable.

Le malheureux piéton, après avoir réussi à contourner ces différents obstacles, doit parfois se plier en deux et faire une courbette pour éviter les branches des arbres d’alignement et d’ornement mal entretenus. Ces arbres, qui en principe ont pour but l’embellissement des rues et des avenues de Kénitra ont, subi les aléas du temps donnant à la ville l’aspect d’une cité hideuse et délaissée. On ne cessera jamais de dire que dans une ville comme Kénitra, le piéton souffre vraiment le martyre.