Casablanca –le12

L’achat d’un bien utilisé occasionnellement n’est pas toujours au goût des consommateurs les plus rationnels, qui privilégient désormais de nouveaux modes de consommation collaborative, reposant sur l’usage plutôt que la possession.

Covoiturage, colocation, coworking, l’économie du partage, favorisée par le développement d’Internet, recouvre un large éventail d’activités où le partage et la mutualisation des biens, services et espaces, sont les mots d’ordre. Un nouveau paradigme qui rompt avec les principes courants de la société de consommation et qui jette les bases d’un modèle économique novateur aux perspectives prometteuses.

Le boom technologique et l’essor de technologies de la communication ont boosté les activités relevant de l’économie collaborative qui a vu son cercle d’adeptes s’élargir sans cesse, grâce à l’émergence sur la toile de plateformes dédiées, facilitant la mise en contact entre des producteurs indépendants et des consommateurs potentiels.

Le Maroc avec une jeune population férue de nouvelles technologies n’est pas étranger à cette tendance, ayant vu plusieurs applications de l’économie du partage séduire un nombre important d’utilisateurs au point de créer la polémique dans certains cas, sur fond d’accusations de concurrence déloyale.

Malgré l’absence d’un cadre juridique propre à ce type d’activités, les applications de l’économie collaborative, qu’elles soient conçues par des développeurs locaux ou internationaux comme Airbnb, poursuivent toujours sur leur lancée, dans un contexte de crise où les consommateurs, faute de moyens, jugent économiquement viable le partage des biens et des services.

Approché par la MAP au sujet de ce vide juridique, Mourad Elajouti, avocat au barreau de Casablanca, a souligné “qu’au Maroc, il n’existe pas encore de cadre légal spécifique relatif à l’économie collaborative”. Les textes applicables sont donc ceux du droit commun à savoir le Dahir des Obligations et Contrats, la Loi n° 31-08, relative à la protection du consommateur ainsi que la Loi n° 09-08 relative à la protection des données à caractère personnel.

Et d’alerter que l’application du droit commun entraine une insécurité juridique dans la mesure où il n’est pas adapté à ces nouvelles formes d’entreprises qui nécessitent une flexibilité contractuelle .

Parmi les risques juridiques, figurent la concurrence déloyale (Loi n° 104-12 relative à la à la liberté des prix et de la concurrence) et les problèmes relatifs à la législation du travail, a-t-il enchaîné, rappelant un certain nombre de décisions de justice en France et aux Etats-Unis qui ont qualifié la relation entre “Uber” et ses coursiers “Uber Eats” de “lien de subordination ouvrant la porte à la possibilité de demander des indemnisations en cas de licenciement”.

L’avocat a mis l’accent également sur la question fiscale, dans la mesure où les utilisateurs de certaines plateformes ne procèdent pas à la déclaration de leurs revenus au fisc, ce qui constitue “un manque à gagner considérable en terme de recettes fiscales”, d’où la nécessité “d’instaurer un cadre législatif adapté qui prendrait en considération toutes ces problématiques”.

Outre le soutien indéniable au pouvoir d’achat des individus, l’économie collaborative présente des gains écologiques non négligeables grâce à une utilisation optimale des biens et services qui prend le contrepied du modèle économique actuel critiqué pour sa lourde empreinte environnementale. Ce parfait compromis entre les besoins de consommation et la protection de l’environnement promet une croissance économique plus durable et responsable où la propriété cèdera le pas à l’usage.