Brasilia –le12
Pays-continent de plus de 212 millions d’habitants, le Brésil a absorbé l’année dernière 1,2 milliard de dollars des exportations marocaines, c’est dire à quel point le pays sud-américain est devenu ces dernières années un des principaux partenaires commerciaux du Royaume.
Facteur clé de cette dynamique de coopération économique soutenue : les deux pays sont en train de fructifier une entente politique de longue date encadrée par plusieurs accords qui touchent différents domaines, dont l’accord de facilitation des investissements signé en 2019.
En janvier dernier, le Maroc est arrivé en tête de la liste des pays arabes exportateurs vers la première économie d’Amérique latine, avec plus de 100 millions de dollars de produits exportés, une valeur 95,5% supérieure à celle du même mois 2020.
L’année dernière, les exportations marocaines vers le marché brésilien ont en effet augmenté de 17,4% en termes de recettes et de 32% en volume, fait observer Tamer Mansour, Secrétaire général de la Chambre de commerce arabo-brésilienne, dans une interview à la MAP.
Pour M. Mansour, ces chiffres montrent qu’”en matière de commerce, on assiste à une dynamique de maturation dans les relations entre le Brésil et le Maroc, grâce notamment à un travail de rapprochement politique entre les deux pays”.
Dans l’autre sens, les exportations brésiliennes vers le Maroc ont augmenté de 43% l’année dernière, totalisant 671,28 millions de dollars, tirées notamment par une hausse significative de l’exportation du poulet, qui a cru de 49,2% en volume et de 3,4% par rapport aux chiffres d’affaires de 2019.
Le Royaume dégage ainsi un excédent commercial avec le géant sud-américain, devenu le troisième partenaire du Maroc, juste derrière la France et l’Espagne.
Au delà des chiffres, à Brasilia l’on a déjà perçu le caractère stratégique des importations marocaines pour un pays à grande vocation agricole comme le Brésil. En octobre dernier, lors du Forum économique Brésil-Pays arabes, le président Jair Bolsonaro a qualifié le Royaume de partenaire “stratégique”, se félicitant de l’”important rapprochement politique” entre les deux pays.
“Le Maroc est un fournisseur essentiel d’engrais et de fertilisants pour l’agro-business brésilien”, avait-il noté.
Le Secrétaire général de la Chambre de commerce arabo-brésilienne partage la même conviction : “le Maroc est un partenaire stratégique de l’agro-industrie brésilienne, non seulement en tant que marché, mais surtout en tant que fournisseur d’intrants essentiels à l’activité agricole, que sont les engrais et les minéraux phosphatés”.
“Sans ces produits, le Brésil ne serait jamais la puissance agro-industrielle qu’il est aujourd’hui”, estime-t-il, citant notamment les vastes terres du Cerrado (plus de 20% du territoire brésilien), où l’on ne peut aucunement s’en passer des engrais.
Néanmoins, un défi s’impose pour les deux pays, appelés à cristalliser et franchir un nouveau palier dans leurs relations économique. Celui de la diversification des domaines de coopération.
Sur cette question-là, “je pense que la priorité est d’aller de l’avant avec l’accord de libre-échange Mercosur-Maroc, en transcendant en particulier les barrières sanitaires et tarifaires tout en protégeant la bonne santé des économies des pays concernés”, soutient M. Mansour.
D’après lui, il existe un environnement de dialogue prometteur en ce qui concerne les négociations de l’accord, car le Brésil, qui entretient de bonne relation avec le Royaume, assumera la présidence du Mercosur en 2021, ce qui pourrait donner aux deux pays l’opportunité d’avancer vers la signature de cet accord susceptible d’élargir l’éventail des produits commercialisés des deux côtés.
Il n’a pas manqué de souligner la “pertinence” de l’établissement de zones franches dans les ports marocains, en particulier celui de Tanger Med. “Pour les entreprises brésiliennes, ces zones sont une opportunité non seulement d’accéder aux marchés africains, mais aussi aux pays de l’Union européenne, au Canada et aux États-Unis via la réexportation, étant donné que le Maroc a déjà signé des accords de libre-échange avec ces pays”.
Pour ce qui est de la diversification des domaines de coopération, les deux pays continuent de jeter les bases d’un partenariat fructueux dans des secteurs aussi divers que la recherche agronomique, la formation professionnelle et la certification sanitaire, le Brésil ayant développé un savoir-faire et une expertise de notoriété mondiale dans ces domaines.
Tout récemment, l’Institut National de la Recherche Agronomique (INRA) et son homologue brésilien, EMBRAPA (Société brésilienne de recherche agricole) ont convenu d’un ambitieux programme de coopération dans le domaine des ressources génétiques, de l’agriculture éco-efficace, de la télédétection pour réduire les risques climatiques, apprend-on auprès de l’ambassade du Maroc à Brasilia.
De son côté, l’OFPPT est en train de promouvoir avec le Service National d’Apprentissage Industriel (SENAI) du Brésil, considéré leader mondial en matière d’éducation professionnelle à distance, une coopération visant particulièrement la formation des formateurs dans les métiers de l’automobile, de l’aéronautique, de la Plasturgie et des énergies renouvelables.
Aussi, afin d’atteindre un meilleur positionnement du Label Maroc sur le marché brésilien, notamment pour la filière agro-alimentaire (huile d’olive, produits de la mer, olives en conserve, pâtes alimentaires, argan cosmétique et alimentaire…), les deux pays viennent d’adopter une série de mesures pratiques destinées à fluidifier les chaînes d’approvisionnement.
Dans ce sens, Morocco Foodex vient d’être enregistré dans le Système brésilien SISCOLE et est désormais autorisé à délivrer des certificats sanitaires aux sociétés marocaines qui souhaitent commercialiser l’agro-alimentaire national sur le marché brésilien (produits laitiers, huile d’olive, industrie vinicole…). L’objectif est que ces produits aient les mêmes conditions d’accès au marché, dont jouissent, depuis plusieurs années déjà, les produits de la mer et qui ont atteint, en 2020, un total export de 44 millions de dollars.
Côté services, le Maroc ambitionne de faire de la logistique maritime un élément structurant de son partenariat avec le Brésil, à travers les terminaux portuaires de Tanger Med et, à moyen terme, de Dakhla Atlantique qui devront se positionner comme les deux hubs logistique et commercial pour l’agro-business brésilien, à l’échelle de l’Atlantique et de la Méditerranée respectivement.
En somme, le Maroc et le Brésil sont pleinement engagés dans un partenariat ambitieux, tourné vers les secteurs à forte valeur ajoutée et qui reflète le choix stratégique fait par les deux pays en termes d’intégration des chaînes de valeur et d’internationalisation, comme en témoigne leur adoption des “bonnes pratiques” de l’OCDE, en matière de sécurité juridique, de régulation des marchés et de transparence financière.
Dans cet esprit, les deux Accords bilatéraux qui sont en voie de finalisation (assistance administrative en matière douanière et échange automatique des données) vont contribuer au raffermissement du partenariat.
