Dans le cadre des réformes volontaristes visant la moralisation de la vie publique, le Maroc mise sur la transformation digitale en vue d’atteindre les objectifs assignés à la stratégie nationale de prévention et de lutte contre la corruption (2015-2025), recommandée par la Convention des Nations unies contre la corruption avec un référentiel pour chaque pays.
Tout comme d’autres expériences internationales, la lutte contre ce fléau au Maroc peut tirer profit de l’évolution numérique. Au demeurant, la transformation digitale constitue un outil indispensable à même de baliser le chemin à la gouvernance responsable, la transparence et la prévention et la lutte contre la corruption.
Dans cette optique, il sied de rappeler le discours de SM le Roi Mohammed VI du 14 octobre 2016 à l’ouverture de la 1ère session de la 1ère année législative de la 10ème législature, dans lequel le Souverain avait affirmé que « l’utilisation des nouvelles technologies contribue à faciliter l’accès, dans les plus brefs délais, du citoyen aux prestations, sans qu’il soit nécessaire de se déplacer souvent à l’Administration et de s’y frotter, car c’est là la cause principale de l’extension du phénomène de corruption et du trafic d’influence ».
Dans son rapport au titre de l’année 2022, l’Instance nationale de la probité, de la prévention et de la lutte contre la corruption (INPPLC), créée en vertu de la loi n° 113-12 de 2015, a mis en évidence la relation étroite entre la transformation digitale d’une part, et la gouvernance responsable, la transparence et la prévention et la lutte contre la corruption d’autre part.
En effet, dans la perspective d’atteindre les objectifs escomptés en termes de probité, de prévention et de lutte contre la corruption tout en garantissant la réussite de la transformation digitale, l’INPPLC, en se basant sur des expériences internationales et l’analyse de l’évolution du contexte national, préconise la mise en place d’un cadre stratégique, une transformation digitale orientée citoyen et des mesures d’accompagnement et de conduite de changement.
Pour ce qui est du cadre stratégique, l’Instance note que le succès de la transformation digitale dépend de l’existence de ce cadre de sorte qu’il garantira aussi bien un portage de haut niveau pour assurer mobilisation, adhésion et forte implication de tous, ainsi qu’une vision globale et intégrée, fixant le cap avec visibilité sur les moyens et longs termes avec des stratégies et des plans opérationnels qui en garantissent l’aboutissement. Ce cadre stratégique permettra également une gouvernance renforcée et structurée autour d’organes dont les rôles et les responsabilités sont clairement définis et bien articulés.
Concernant le second volet, l’INPPLC souligne que la transformation digitale doit être orientée citoyen. Cette orientation devrait notamment passer par l’amélioration de la qualité des services publics et la mise en place des moyens d’appréciation et d’évaluation, et la consolidation de l’inclusion digitale des citoyens en renforçant les infrastructures, prenant en considération les spécificités de certaines catégories de la population et privilégiant les services de proximité.
En dernier lieu, l’Instance préconise que la réalisation des résultats escomptés est tributaire de la mise en place de mesures d’accompagnement et de conduite de changement particulièrement en matière de renforcement et de valorisation du capital humain avec des actions de sensibilisation, de formation et de motivation, outre la consolidation du cadre réglementaire et normatif.
Ce dispositif est encadré par l’article 167 de la Constitution de 2011 qui stipule : « L’Instance nationale de probité et de lutte contre la corruption, créée en vertu de l’article 36, a pour mission notamment de coordonner, de superviser et d’assurer le suivi de la mise en œuvre des politiques de prévention et de lutte contre la corruption, de recueillir et de diffuser les informations dans ce domaine, de contribuer à la moralisation de la vie publique et de consolider les principes de bonne gouvernance, la culture du service public et les valeurs de citoyenneté responsable ».
Par ailleurs, l’engagement du Maroc à l’international constitue également un élément important qui participe de cette stratégie, comme en témoigne l’adoption par la 10ème conférence des Etats parties à la Convention des Nations Unies contre la corruption (CNUCC), tenue en décembre dernier à Atlanta, de 11 résolutions par consensus, dont celle présentée par le Maroc portant sur le « Suivi de la Déclaration de Marrakech sur la prévention de la corruption ».
Dans ce contexte, l’INPPLC avait organisé, en octobre dernier, une conférence régionale africaine, qui a regroupé une vingtaine de pays du continent, à l’issue de laquelle les participants ont adopté la « Déclaration de Rabat » qui a été soumise en tant que document officiel de la 10ème Session de la Conférence des Etats parties à la Convention des Nations Unies contre la Corruption.