Casablanca – le12

L’engouement des marocains pour la consommation des produits bio commence à se faire sentir de plus en plus au Maroc, avec notamment un appétit en forte croissance pour des aliments exempts de pesticides dont la production respecte l’environnement, notamment dans une conjoncture marquée par la crise sanitaire du nouveau coronavirus (covid-19).

Au Maroc, le bio est encore une petite niche, croissante cependant, qui mobilise les exportateurs et surtout des gens passionnées sur le marché national, qui lancent des initiatives personnelles ainsi que des coopératives dans l’esprit des entreprises solidaires.

Alors que les consommateurs recherchent des produits agricoles et alimentaires sains et propres en cette période de crise, les aliments biologiques s’avèrent être la nourriture de choix pour la maison, a relevé dans une déclaration à la MAP, le président du club des entrepreneurs Bio (CEBio), Slim Kabbaj.

Au Maroc, on a compris tôt que la pandémie attaquait les gens fragiles à système immunitaire faible et comme la production bio répond à une problématique de santé, le lien a été automatiquement fait par le consommateur marocain, qui n’a pas hésité à se tourner vers des produits perçus “comme meilleurs pour la santé” pour se protéger et se sentir en sécurité, a expliqué M. Kabbaj, également président de la société Green Village, premier réseau marocain spécialisé dans le secteur bio.

Il a, en outre expliqué que la crise sanitaire est en train de mettre un focus important sur les produits santé et pousser les distributeurs à aller encore plus loin dans l’assortiment de produits frais, en vue de répondre à une consommation accrue à domicile (moins de voyages, plus de télétravail, moindre fréquentation des restaurants). Ces phénomènes pourraient bien profiter au bio sur les catégories où il est encore à développer.

Interrogé sur l’évolution du secteur bio durant les dix dernières années, Slim Kabbaj a souligné qu’au niveau de la distribution et de la disponibilité des produits sur le plan national, une évolution de 10% a été notée durant les 5 dernières années, notamment avec l’ouverture de plus en plus de points de vente, que ce soit les marchés de proximité, les pharmacies ou encore les parapharmacies.

En termes de production, il y a eu une augmentation légère des produits locaux (frais) notamment les fruits et légumes et en termes d’export, il y a eu des progrès intéressants en transformation bio, ce qui a permis une avancée significative sur certains secteurs, notamment la culture de la grenade, du raisin et des baies de goji, qui ont commencé à se vendre en Allemagne et en Angleterre, grâce à des entrepreneurs bio innovants, a-t-il poursuivi.

S’agissant des défis à relever pour développer ledit secteur, M. Kabbaj, qui n’a pas manqué de saluer les avancées réalisées par le gouvernement marocain en matière de réglementation, a souligné l’impératif de mettre en place des soutiens innovants pour le développement du Bio outre “la mise en place d’un partenariat public-privé solide, rigoureux et pérenne, à même de structurer le tissu des productions biologiques au Maroc.”

“Il est nécessaire que les organisations associatives soient dynamiques et mettent en avant des stratégies de sensibilisation des consommateurs, une communication convaincante vers les opérateurs qui pourraient être tentés par la conversion”, a-t-il fait observer, notant qu’un travail au niveau des différentes régions du Royaume est nécessaire à cet égard.

Le fil d’Ariane des stratégies dans le Bio selon Slim Kabbaj, devrait commencer dans un premier temps, par la consommation et la dynamisation de la demande. “Quand la demande est là, l’initiative privée va naturellement à sa rencontre, avec des offres plus ou moins adaptées” a-t-il précisé.

En effet, les premières fermes Bio au Maroc se sont développées pour répondre à la demande des consommateurs européens, via les distributeurs du continent, alors qu’actuellement, le consommateur marocain s’intéresse lui même au produit Bio et le trouve de plus en plus dans les points de vente.

“Petites ou grandes surfaces, supermarchés spécialisés ou magasins mixtes, le déclencheur essentiel du mouvement Bio est dans la consommation”, a-t-il noté, préconisant par la même, la nécessité de concevoir des campagnes de communication justes et multidimensionnelles ciblant les consommateurs, avec une argumentation solide, basée sur les questions de santé et sur la protection de l’environnement.

M. Kabbaj a, par ailleurs fait savoir que les besoins en ressources humaines dans la filière Bio sont criants à différents niveaux et que les petits agriculteurs se plaignent du manque de main d’œuvre technique qualifiée sur leurs fermes, notant que nombreux d’entre eux sont amenés à réduire leurs ambitions, de même pour les propriétaires terriens, qui ne trouvent que rarement les cadres nécessaires capables de développer des unités de production Bio ou encore les managers d’unités agro-industrielles à valeur ajoutée, qui souffrent de la même problématique.

Et de poursuivre que comme dans d’autres domaines, le challenge étant de trouver la bonne adéquation entre les formations et les différents besoins sur le terrain.

De la même manière que la crise actuelle pourrait avoir comme conséquence l’accélération de l’adoption du e-commerce, le bio et les promesses alternatives dans leur ensemble, pourraient convaincre de nouvelles cibles, conquérir de nouveaux territoires et à terme encourager leur développement et leur présence dans le panier post-Covid des marocains.